Les feuilles d'automne sont souvent rouges !
Dans une news @Nature récente Katharine Sanderson décrit les recherches deEmily Habinck de l'Université de Caroline du Nord : Un jour elle a observé que les arbres dans une plaine alluviale étaient bien plus rouges que sur une hauteur proche. Or le sol est très riche dans la plaine et pauvre en nutriments sur les hauteurs. Elle a présenté à une conférence de la société géologique d'Amérique à Denver, Colorado ses conclusions : rendre la feuille rouge est coûteux, mais permet de récupérer plus de nutriments (azote notamment) vers le tronc et les racines et donc un sol pauvre oblige la plante a rougir les feuilles pour mieux récupérer le peu qu'il y a.
Complément février 2014 : De récentes recherches apportent a cette question des réponses assez solides : Cf Bio-Tremplins fin 2013
Une question encore ouverte !
La question de la couleur des feuilles à l'automne, apparemment facile, n'a pas de réponse claire et indiscutable d'après Sanderson, surtout en ce qui concerne ces splendides rouges.
On sait qu'avec l'arrivée de l'automne et la nuit qui s'allonge, les feuilles décomposent la Chlorophylle de leurs feuilles et redistribuent les nutriments vers les racines et les troncs. La couleur jaune des caroténoïdes (notamment les carotènes alpha et bêta et la Lutéine) - qui bien là avant - est alors dé-masquée.
Mais les rouges proviennent d'anthocyanes qui sont des pigments rouges (en milieu acide, ils sont de bons indicateurs de pH) fabriqués spécialement à l'automne.
Pourquoi la plante perdrait de l'énergie à fabriquer des pigments dans des feuilles condamnées durant cette phase de mise en réserve a fait l'objet de spéculations depuis longtemps. Certains ont proposé un rôle d'antioxydant, ou pour attirer les oiseaux afin de disséminer le fruits, ou encore pour mieux capter les rayons du soleil et lutter contre le froid. On a aussi observé que les couleurs les plus somptueuses se produisent lors des automnes froids.
Un rôle protecteur contre les effets de la lumière ?
William Hoch, en 2001 avait proposé que ces pigments agiraient comme une protections solaire - une fois que la chlorophylle est éliminée et n'absorbe plus les rayons du soleil - ce qui conserve les feuilles sur l'arbre plus longtemps et permet d'en extraire plus de nutriments. En effet les feuilles restent plus longtemps sur l'arbre si elles sont protégées. Hoch a produit des arbustes mutants (Cornus sericea, Vaccinium elliottii , et Viburnum sargentii) qui ne produisent pas d'anthocyanes. Ces arbres ont perdu leurs feuilles encore vertes lorsqu'elles ont été exposées au stress du froid et de la lumière, et les arbres ont stocké beaucoup moins d'azote pour l'hiver.
En effet la lumière produit dans les cellules des radicaux libres qui sont potentiellement destructeurs. Les plantes sont capables de "tourner à vide " pour dissiper l'excès d'énergie captée.
Je pense que le froid aggrave la situation car il ralentit les réactions chimiques et donc l'absorption d'énergie en amont.
L'étude de Emily Habinckdans la Réserve de Charlotte renforce cette hypothèse du rôle protecteur des anthocyanes : sur un sol pauvre, il est avantageux de produire des anthocyanes pour sauvegarder les feuilles le plus longtemps possible. L'étape suivante est d'analyser les images satellites pour voir si une corrélation peut être montrée entre les colorations des arbres et la nature du sol.
Limites
Cette hypothèse n'explique pas de manière très convaincante pourquoi certaines espèces sont presque toujours rouges et d'autres quasi-jamais. Probablement que c'est une partie de la réponse seulement. D'ailleurs L'article de Hoch et al (2003) suggère que certains arbres (Betula papyrifera)parviennent fort bien à récupérer autant d'azote sans produire d'anthocyanes
On n'a donc pas LA Réponse unique et définitive. (ça n'arrive que dans les romans : 42)
Peut-être que c'est frustrant, sûrement que c'est un reflet honnête de la science où les connaissances se construisent peu à peu dans un champ d'incertitudes qui recule toujours en s'élargissant.
Compléments
On le sait, au moment où les feuilles doivent être abandonnées elles ne tombent pas simplement parce qu'elles sont mortes,l'abscission est un processus actif (on le voit bien lorsqu'une branche est coupée en été : les feuilles meurent, mais restent bien fixées) : la plante produit une zone spéciale protectrice, avec du liège et une zone séparatrice (où la paroi des cellules est dégradée). Cette zone d'abscission à la base du pétiole qui permet de se séparer activement des feuilles. Cette abscission est inhibée chez les feuilles jeunes par des cytokinines et activée par l'hormone Éthylène.
Fig 2 : Le pétiole dans la zone d'abscission
Source : McGraw-Hill Online Learning Center Test
L’éthylène - un gaz- stimule aussi le mûrissement de nombreux fruits et explique comment on fait mûrir les bananes en entrepôt avec ce gaz ... que nos grand-mères savaient mettre à profit : une pomme mûre dans un cornet avec des fruits verts accélère leur maturation .Cela explique pourquoi dans un navire bananier, si quelques bananes mûrissent on jette par dessus-bord toute la cargaison du secteur concerné : sinon elles mûrissent toutes d'un coup et pourrissent vite ! .
Pourquoi un fruit mûr accélérerait à ce point les autres à mûrir est une belle question : ce feed-back positif pourrait assurer une meilleure dissémination en attirant de plus nombreux animaux. Et les fruits qui mûriraient après les autres risqueraient d'être ignorés par les animaux disséminateurs en train de se goinfrer sur d'autres arbres pleins de fruits plus loin !
mais c'est juste une hypothèse !
Qui en sait plus ?
Sources
Dans une news @Nature récente Katharine Sanderson décrit les recherches deEmily Habinck de l'Université de Caroline du Nord : Un jour elle a observé que les arbres dans une plaine alluviale étaient bien plus rouges que sur une hauteur proche. Or le sol est très riche dans la plaine et pauvre en nutriments sur les hauteurs. Elle a présenté à une conférence de la société géologique d'Amérique à Denver, Colorado ses conclusions : rendre la feuille rouge est coûteux, mais permet de récupérer plus de nutriments (azote notamment) vers le tronc et les racines et donc un sol pauvre oblige la plante a rougir les feuilles pour mieux récupérer le peu qu'il y a.
Complément février 2014 : De récentes recherches apportent a cette question des réponses assez solides : Cf Bio-Tremplins fin 2013
Une question encore ouverte !
La question de la couleur des feuilles à l'automne, apparemment facile, n'a pas de réponse claire et indiscutable d'après Sanderson, surtout en ce qui concerne ces splendides rouges.
On sait qu'avec l'arrivée de l'automne et la nuit qui s'allonge, les feuilles décomposent la Chlorophylle de leurs feuilles et redistribuent les nutriments vers les racines et les troncs. La couleur jaune des caroténoïdes (notamment les carotènes alpha et bêta et la Lutéine) - qui bien là avant - est alors dé-masquée.
Mais les rouges proviennent d'anthocyanes qui sont des pigments rouges (en milieu acide, ils sont de bons indicateurs de pH) fabriqués spécialement à l'automne.
Pourquoi la plante perdrait de l'énergie à fabriquer des pigments dans des feuilles condamnées durant cette phase de mise en réserve a fait l'objet de spéculations depuis longtemps. Certains ont proposé un rôle d'antioxydant, ou pour attirer les oiseaux afin de disséminer le fruits, ou encore pour mieux capter les rayons du soleil et lutter contre le froid. On a aussi observé que les couleurs les plus somptueuses se produisent lors des automnes froids.
Un rôle protecteur contre les effets de la lumière ?
William Hoch, en 2001 avait proposé que ces pigments agiraient comme une protections solaire - une fois que la chlorophylle est éliminée et n'absorbe plus les rayons du soleil - ce qui conserve les feuilles sur l'arbre plus longtemps et permet d'en extraire plus de nutriments. En effet les feuilles restent plus longtemps sur l'arbre si elles sont protégées. Hoch a produit des arbustes mutants (Cornus sericea, Vaccinium elliottii , et Viburnum sargentii) qui ne produisent pas d'anthocyanes. Ces arbres ont perdu leurs feuilles encore vertes lorsqu'elles ont été exposées au stress du froid et de la lumière, et les arbres ont stocké beaucoup moins d'azote pour l'hiver.
En effet la lumière produit dans les cellules des radicaux libres qui sont potentiellement destructeurs. Les plantes sont capables de "tourner à vide " pour dissiper l'excès d'énergie captée.
Je pense que le froid aggrave la situation car il ralentit les réactions chimiques et donc l'absorption d'énergie en amont.
L'étude de Emily Habinckdans la Réserve de Charlotte renforce cette hypothèse du rôle protecteur des anthocyanes : sur un sol pauvre, il est avantageux de produire des anthocyanes pour sauvegarder les feuilles le plus longtemps possible. L'étape suivante est d'analyser les images satellites pour voir si une corrélation peut être montrée entre les colorations des arbres et la nature du sol.
Limites
Cette hypothèse n'explique pas de manière très convaincante pourquoi certaines espèces sont presque toujours rouges et d'autres quasi-jamais. Probablement que c'est une partie de la réponse seulement. D'ailleurs L'article de Hoch et al (2003) suggère que certains arbres (Betula papyrifera)parviennent fort bien à récupérer autant d'azote sans produire d'anthocyanes
On n'a donc pas LA Réponse unique et définitive. (ça n'arrive que dans les romans : 42)
Peut-être que c'est frustrant, sûrement que c'est un reflet honnête de la science où les connaissances se construisent peu à peu dans un champ d'incertitudes qui recule toujours en s'élargissant.
Le savant n'étudie pas la nature parce que cela est utile; il l'étudie parce qu'il y prend plaisir et y prend plaisir parce qu'elle est belle. Si la nature n'était pas belle, elle ne vaudrait pas la peine d'être connue (et) la vie ne vaudrait pas la peine d'être vécue. Je ne parle pas ici, bien entendu, de cette beauté qui frappe les sens, de la beauté des apparences; non que je n'en fasse fi, loin de là, mais elle n'a rien à faire de la science; je veux parler de cette beauté plus intime qui vient de l'ordre harmonieux des parties, et qu'une intelligence pure peut saisir.
Simon Singh, (2007), Le roman du Big Bang, Ed J.-C. Lattes p.30
Compléments
On le sait, au moment où les feuilles doivent être abandonnées elles ne tombent pas simplement parce qu'elles sont mortes,l'abscission est un processus actif (on le voit bien lorsqu'une branche est coupée en été : les feuilles meurent, mais restent bien fixées) : la plante produit une zone spéciale protectrice, avec du liège et une zone séparatrice (où la paroi des cellules est dégradée). Cette zone d'abscission à la base du pétiole qui permet de se séparer activement des feuilles. Cette abscission est inhibée chez les feuilles jeunes par des cytokinines et activée par l'hormone Éthylène.
Fig 2 : Le pétiole dans la zone d'abscission
Source : McGraw-Hill Online Learning Center Test
L’éthylène - un gaz- stimule aussi le mûrissement de nombreux fruits et explique comment on fait mûrir les bananes en entrepôt avec ce gaz ... que nos grand-mères savaient mettre à profit : une pomme mûre dans un cornet avec des fruits verts accélère leur maturation .Cela explique pourquoi dans un navire bananier, si quelques bananes mûrissent on jette par dessus-bord toute la cargaison du secteur concerné : sinon elles mûrissent toutes d'un coup et pourrissent vite ! .
Pourquoi un fruit mûr accélérerait à ce point les autres à mûrir est une belle question : ce feed-back positif pourrait assurer une meilleure dissémination en attirant de plus nombreux animaux. Et les fruits qui mûriraient après les autres risqueraient d'être ignorés par les animaux disséminateurs en train de se goinfrer sur d'autres arbres pleins de fruits plus loin !
mais c'est juste une hypothèse !
Qui en sait plus ?
Sources
- Katharine Sanderson, (2007), Why autumn leaves turn redNature news 29 October 2007 | doi:10.1038/news.2007.202
- Hoch WA, Singsaas EL, McCown BH. ,(2003) Resorption protection. Anthocyanins facilitate nutrient recovery in autumn by shielding leaves from potentially damaging light levels.Plant Physiol. 2003 Nov;133(3):1296-305. Epub 2003 Oct 2.