dimanche 6 janvier 2008

L'enzyme contre la GdB et l'évolution des levures !



A tous les biologistes intéressés à recevoir des bio-reviews
L'alcool ... hips ?
Avec les fêtes plusieurs d'entre nous auront testé les effets de l'alcool sur notre cerveau. Et ceux qui n'ont pas su "consommer avec modération " auront exploré les effets de la GdB
Une news @ Nature (Gramser, Siëlle (2005). Alcohol and science: The party gene) éclaire un peu la question de l'origine de ces boissons.

N.B Prolune a fait un article très complet "In vino veritas" avec une perspective historique, les effets physiologiques et les mécanismes.


Le rôle central des levures
On sait bien que l'alcool est produit par des levures (Saccharomyces cerevisiae : uniprot taxonomy) sur des sucres dans des fruits, notamment le raisin, à l'aide d'enzymes Alcool DesHydrogénases (ADH)
On sait aussi que cette levure est à la fois capable de produire de l'ethanol à l'aide d'une enzyme ADH1 (sur le chromosome XV @ mapviewer), et qu'elle peut aussi la dégrader avec ADH2 (sur le chromosome XIII @ mapviewer), pour l'exploiter comme source d'énergie.
On sait aussi qu'elle supporte des doses d'alcool bien supérieures aux autres organismes.
Il n'était pas très clair quel pourrait être l'intérêt de transformer des sucres en alcool puis de les reconvertir pour les faire entrer dans ses voies biochimiques classique et en faire de l'ATP.

L'arbre généalogique des ADH reconstitué chez les levures
Dans une recherche récente commenté dans une news de nature (Michael Hopkin (2007) Grape genome unpicked) une équipe menée par Benner, S. (2005) a troouvé les séquences de ces ADH chez 12 espèces de levures puis les a alignées et a pu reconstituer une séquence originelle probable d'où toutes les ADH seraient issues et un arbre évolutif : un cladogramme comme celui-ci.

Source Thomson et al. Nature Genetics.

La levure en compétition
La séquence originelle probable AdhA est très proche de l'ADH1 actuelle et les données leur ont permis de déduire que la duplication de l'ADH s'est produite il y a environ 80-60 mio d'années.
Cela élimine les hypothèses - chères à Bacchus et bien des vignerons - selon lesquelles l'homme aurait sélectionné les levures dans son travail. Benner observe que cela coincide avec le développement des plantes à fleurs (et donc à fruits ... ) et pense que dans ce monde soudain très riche en sucres cela aurait donné à ces levures un avantage sélectif sur lees frugivores et les autres candidats à la dégradation des fruits (bactéries etc) en éliminant des concurrents. Même s'il n'est pas efficace de convertir les sucres en alcool puis de les reconvertir pour les exploiter, cela vaut la peine si on élimine la concurrence !

Mais l'évolution ne s'arrête pas là !
Il note aussi que c'est vers cette époque que les drosophiles sont apparues et qu'elles sont actuellement munies d'une autre ADH qui les rend capables de supporter et d'exploiter l'alcool. Luciano Matzkina étudié les espèces différentes de Drosophila et trouvé qu'elles ont des variantes différentes d' ADH qui leur permettent de se nourrir des jus de fruits avec 4% d'alcool (comparable à la bière) et pas mal de levures.
On aurait ainsi une compétition protectionniste entre les différents décomposeurs et frugivores !

Drosophila melanogaster (Source Wikipédia)
Les enzymes proches de l'ADH sont fréquentes dans le vivant et ont des rôles assez divers. Selon Ary Hoffmann (2005) elles peuvent évoluer assez vite : il a observé en Australie qu'une variante (AdhS, plus résistante au chaud) s'est répandue sur 400km en 20 ans.
Et ADH chez l'humain ?
L'enzyme ADH que nous avons est encore un peu différente et est probablement présente depuis longtemps pour d'autres fonctions, encore peu claires selon Gramser, peut être pour dégrader le formaldéhyde (toxique). Sa mise a profit pour une des boissons les plus contrastées de notre temps (citons ses riches liens culturels profonds mais aussi la mortalité et les effets sur la santé qu'elle cause) est donc secondaire.
Cette enzyme a en tous cas permis d'écrire -ou de compléter temporairement- quelques pages de l'histoire évolutive de la levure, de la mouche à vinaigre et de l'humain.


Compléments
On dispose du génome de la levure Saccharomyces cerevisiae complète @ mapviewer : 16 chromosomes , 12 Mbases

Les 16 chromosomes de la levure @ mapviewer :



On dispose depuis peu du génome du raisin Vitis vinifera ils ont séquencé un Pinot Noir. Un commentaire dans nature news (Michael Hopkin 2007) : Grape genome unpicked nous apprend qu'il a environ 30'000 gènes -plus que nous - et on y a trouvé un très grand nombre (70-80 ) de gènes pour des terpènes dont on sait le rôle pour composer les arômes subtils.

Source nature news (Getty)

Liens :

Ressources BIST :

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire