mardi 29 mai 2007

le champignon qui "mange" les rayonnements ?

Alors que certains veulent relancer le nucléaire, il y a des organismes à qui ça ne déplairait pas...

Résister aux radiations !

On connaissait depuis 1956 la bactérie Deinococcus radiodurans qui supporte des doses de radio-activité énormes (2000 fois la dose mortelle pour nous) (un article intéressant par S. Sommer (2006) au cnrs sur cette bactérie extremophile) Il semble que ce soit une résistance acquise contre les effets de la dessication qui la rend résistante aux rayonnements.
Fig. 1. Résistance exceptionnelle de D. radiodurans aux radiations ionisantes Source : Sommer (2006)
" La résistance exceptionnelle de D. radiodurans au rayonnement ionisant et à des cycles répétés de dessication-réhydratation semble être la conséquence de processus d'évolution qui augmentent l'efficacité des mécanismes connus de réparation de l'ADN. Chaque mécanisme contribue probablement de façon modeste mais, ensemble, ils sont capables de conférer à D. radiodurans cette exceptionnelle capacité à réparer les cassures de l'ADN." ibidem.
Le mécanisme de réparation extrêmement efficace de l'ADN repose sur une grande redondance des adn circulairees et la réparation par alignement des séquences brisées avec des séquences restées intactes. (Intranet)

Mieux que résister : tirer son énergie des radiations ?

Depuis l'accident nucléaire de 1986 à Tchernobyl Arturo Casadevall a montré que les champignons noirs 'black fungi' se sont fortement développés sur les murs hautement radio-actifs du réacteur et semblent pousser vers les zones les plus contaminées !

Une équipe menée par Ekaterina Dadachova au Albert Einstein College of Medicine de New York ont montré que certains champignons (comme Cladosporium sphaerospermum ou Wangiella dermatitidis exploitent la mélanine, (un pigment qu'on trouve dans notre peau et cheveux, etc) afin d'exploiter l'énergie de radiations ionisantes pour leur croissance.

L'équipe de Dadachova a montré que les radiations causent un changement de conformation de la molecule de mélanine qui la rend 4 fois plus efficace pour réaliser une réaction métabolique. Fungal strains without melanin generally did not grow faster in response to radiation.

Il faut peut-être être prudent avant de clamer qu'on a une culture pour les vaisseaux spatiaux ( j'ai lu ça, oui !) parce que a) ce n'est pas encore vraiment confirmé : si Dadachova dit que "Protection doesn't play a role here. It is real energy conversion." Il y a en effet des modificatiosn ds propriétés de transfert d'électrons qui évoquent la photosynthèse. D'autres comme Jennifer Riesz, biophysicienne at l'Université de Queensland en Australie argumentent que l'effet protecteur connu de la mélanine (absorber et dissiper l'énergie) donnerait simplement à ces champignons un avantage face aux autres moins protégés !
Et que b) ce ne serait qu'un léger avantage : le passage facilité d 'étapes dans des voies biochimiques (absorbtion d'acétate,...)

Je note aussi la grande prudence de l'article d'origine qui contraste avec les titres accrocheurs -même de Nature News (oui,...le mien aussi !)
Conclusions/Significance
Exposure of melanin to ionizing radiation, and possibly other forms of electromagnetic radiation, changes its electronic properties. Melanized fungal cells manifested increased growth relative to non-melanized cells after exposure to ionizing radiation, raising intriguing questions about a potential role for melanin in energy capture and utilization.

Références

Les journées de la microbiologie

Les 1ères journées de la microbiologie 31 mai 1 juin 07

Au Centre Médical Universitaire (CMU), rue Michel Servet 1, Genève
1ères Journées de microbiologie
Ces journées sont également une opportunité de rencontrer et de discuter avec des chercheurs et des médecins qui travaillent au quotidien avec des microorganismes.
Tout public.
Deux jours pour découvrir les différents aspects du monde microbien dans lequel, et avec lequel, nous vivons; monde à la fois fascinant et prometteur, mais également inquiétant lorsqu'il affecte notre santé.

Programme complet ici

mardi 22 mai 2007

'Larval therapy' : des asticots contre les résistances bactériennes ?

'Larval therapy'

Difficile à supporter comme image !

Pourtant, dans une news de nature Katherine Sanderson révèle que c'est une thérapie très sérieusement étudiée pour guérir des plaies infectées de bactéries résistantes à nos antibiotiques les plus puissants (methicillin-resistant Staphylococcus aureus (MRSA)) Depuis la guerre Civile aux USA on savait que les asticots peuvent aider à guérir les plaies infectées. Actuellement on est de plus en plus impuissants face a certaines infections résistantes à tout. Cela arrive notamment dans les cas de diabète comme sur cette image. "Larval therapy": cet euphémisme cache un traitement à vous donner des hauts-le-coeur : on laisse les asticots agir sur la plaie durant 4-5 jours et on répète 3 à 5 fois. Cela a guéri 12 sur 13 patients dans une étude menée par Andrew Boulton a l'Universite de Manchester. Une étude a plus grande échelle est en train de se mettre en place.
L'efficacité semble reposer soit sur des sécrétions antibiotiques que les asticots sécrèteraient, soit sur le simple fait qu'ils mangeraient les tissus infectés.

Dans le registre de l'étrange, mais moins gore, on a aussi identifié des effets antibiotiques du miel. Depuis l'antiquité on a conseillé le miel sur les plaies, et en 2002 Rose Cooper, une microbiologist à l'Université de Cardiff, a montré que le miel est 3 fois plus efficace qu'une simple couche de sucre : ce n'est donc pas seulement une effet de protection contre l'air qui est en jeu. Notez bien qu'il ne suffirait pas d'aller acheter du miel au supermarché et de s'en badigeonner ; le traitement à chaud du miel habituel détruit sans doute les propriétés antibiotiques.

Clairement on commence à élargir le champ des recherches pour trouver des solutions aux antibiorésistances de plus en plus difficiles à contrer.
Nature a tout un dossier sur le web : "In focus antibiotics "
On y trouve aussi que les prescriptions habituelles pourraient être trop longues, qu'une approche linguistique ( oui, une analyse avec des outils linguistiques des séquences des antibio existants pour y trouver des sortes de règles de grammaire a produit des antibiotiques nouveaux !), les espoirs par des bactéries prédatrices ou des virus bactériophages, que les antibiorésistances abondent dans le sol ( ça plaira comme argument dans l'évolution ça,) etc.

Sources :
  • Katharine Sanderson, (2007),Maggots eat up resistant bacteria Creepy crawlies are the latest weapon in the anti-MRSA arsenal. news @ Nature 4 May 2007; | intranet doi:10.1038/news070430-13
  • Bowling F. L., Salgami E. V., Boulton A. J. M., et al. Diabetes Care, 30 . 370 - 371 (2007)

  • Cooper, R. A., Molan, P. C. & Harding, K. G. The sensitivity to honey of Gram-positive cocci of clinical significance isolated from wounds. Journal of Applied Microbiology, 93, 857 - 863, (2002). | Article |

mardi 15 mai 2007

Pourquoi les feuilles sont -elles vertes ?


La question de la couleur verte des feuilles est une belle question. Pertinente, simple, elle parait facile...

Et vous leur avez répondu quoi ?

Sur internet on trouve le plus facilement des réponses en rapport avec la Chlorophylle qui est verte (exemple)

Mais alors "Pourquoi la chlorophylle est-elle verte ? "

En première analyse, comme le vert est au environ milieu du spectre de la lumière solaire, on pourrait penser qu'il y aurait abondance de rayons verts.
Donc les feuilles seraient vertes ? j'ai entendu ça une fois ...
Pourtant si nous voyons les feuilles vertes, c'est justement qu'elles renvoient ces abondants rayons verts, ils ne sont donc pas absorbés pour la photosynthèse...

Spectre d'absorbtion de la chlorophylle a, b : on voit que le vert n'est presque pas absorbé. Source :unh.edu
On peut commencer à réfléchir sur les Chlorophylles A et B, entre les Photosystèmes I et II, au rôle des pigments accessoires ( Caroténoides), les transferts d'énergie entre les molécules "antenne" et les centres réactionnels qui font la photolyse de l'eau etc.
ça impressionne son monde avec plein de jargon... et ça cache -souvent- qu'on en sait pas vraiment.

Alors Il reste à inventer un truc vague pour évacuer le problème, à le renvoyer à des recherches, ou à dire "je ne sais pas" ce qui est difficile à avaler,...

En fait le problème est peut-être de penser qu'il y aurait une réponse correcte et définitive.
Comme si la science était une somme de certitudes, de conclusions bien établies,... que les enseignants devraient savoir et transmettre.

Avant tout, les biosciences sont des sciences expérimentales et se définissent par les caractéristiques suivantes :
1.
Les connaissances sont fondées sur l'observation ou l'expérimentation.
2.
C'est une ensemble de méthodes et de disciplines groupées autour des processus vivants et des interrelations entre les organismes vivants.
3. Elles existent dans un environnement d'hypothèses courantes plutôt que de certitudes.
4.
Elles incluent des disciplines en changement rapide.
5.
Ce sont des disciplines essentiellement pratiques et expérimentales . (Sears & Wood, 2005, p.3 Traduction personnelle)

Vu comme ça, on peut aborder la question en disant que "d'après ce que j'ai lu, il ne semble pas qu'on sache pourquoi les feuilles sont vertes"
a) Je trouve que c'est mieux pour l'estime de soi que " je ne sais pas",
b) ça contribue a donner une image de la science dynamique où les connaissances sont des hypothèses courantes, comme un processus ou le plaisir de chercher et de trouver est plus important que la sécurité d'illusoires certitudes.
c) ça place la réponse dans un contexte de citation.

Ceci dit, il y a une pièces de plus à ajouter a notre ensemble d'hypothèses depuis peu : une news dans Nature parle de Nancy Kiang, une biométéorologue de la NASA qui a étudié les conditions dans lesquelles la photosynthèse pourrait se faire sur d'autres planètes. La couleur de la plante dépend selon ses travaux des longueurs d'onde de la lumière qui arrive au sol. Dans cette perspective, les plantes vertes ne seraient pas "une de ces bizarreries de l'évolution", mais un optimum : les photos bleus sont plus énergétiques donc il faut les capturer, les rouges sont plus nombreux donc il faut les capturer, les verts sont donc moins intéressants. (il y a un bon abstract dans pubmed )

Pour ceux qui en veulent encore plus ...

son équipe conclut que "Given the surface incident photon flux density spectrum and resonance transfer in light harvesting, we propose some rules with regard to where photosynthetic pigments will peak in absorbance: (1) the wavelength of peak incident photon flux; (2) the longest available wavelength for core antenna or reaction center pigments; and (3) the shortest wavelengths within an atmospheric window for accessory pigments. That plants absorb less green light may not be an inefficient legacy of evolutionary history, but may actually satisfy the above criteria."
Figure 2- a) Solar spectral photon flux densities at the top of the Earth's atmosphere and at the Earth's surface, and estimated in vivo absorption spectra of photosynthetic pigments of plants and algae.(Kiang et al. source pdf)
Et là je vous aide moins ... je n'ai pas absolument tout compris, mais cela serait un optimum entre (1) la longueur d'onde où il y a un max de photons, (2) la longueur d'onde la plus grande disponible pour les pigments qui captent la lumière (antenne) ou la transforment en énergie chimique (centres réactionnels) (3) la longueur d'onde pour les pigments accessoires la plus courte qui passe bien dans l'atmosphère (Qui absorbe fortement certaines longueurs d'onde : les "creux" sur le graphique sont l'absorption de H2O et O2)

Bien sur on peut aller plus loin... cf l'article complet (pdf) qui contient un review approfondi.

Références

mardi 8 mai 2007

La génétique moléculaire de l'évolution : vidéo



Voici une conférence donnée par Denis Duboule, bien connu pour ses travaux sur les gènes architectes, figure très reconnue de l'Université de Genève, responsable du pôle Frontiers in Genetics, etc sous forme de vidéo , où il explique comment la moléculaire et l'évolution forment une nouvelle discipline en biologie.

La génétique moléculaire de l'évolution, une science du XXI siècle 21 février 2006

Je n'ai pas trouvé la discussion à la fin extrêmement indispensable. Mais naturellement, en classe on peut n'en passer que des extraits !

samedi 5 mai 2007

le chimpanze plus évolué que nous ?

Plus évolués que nous ?

Selon une étude -portant sur 14'000 gènes équivalents entre les 2 espèces- et menée par M. A. Bakewell et al. à l'University du Michigan, Ann Arbor, les chimpanzees ont au moins 233 gènes qui ont des mutations favorablement sélectionnées. Et nous 154. De ce point de vue ils sont donc plus évolués : la sélection les a fait bénéficier de plus de changements que nous... troublant, non !

Précisément ces résultats suggèrent que depuis notre divergence d'avec lui, il y a 6 million d'années, plus de gènes du chimpanzé ont été changés par selection positive : des mutations favorables sont favorisées par la sélection naturelle.

En fait la question du plus évolué est faussée : l'idée qu'il y aurait une espèce plus évoluée que d'autres ...

Souvent nous nous considérons comme "plus évolués" que les autres espèces. Et l'évolution serait vue comme une ligne dont nous sommes le point ultime avec les chimpanzés un peu avant et en remontant on trouverait les batraciens et tout au début la bactérie... Tout ce qu'on sait sur l'évolution montre que l'évolution est plutôt un arbre qu'une ligne et que chaque espèce actuelle peut revendiquer autant d'évolution que les autres...ça ne m'empêchera pas de préférer l'espèce humaine, mais je sais que c'est subjectif.

S.J. Gould avait bien analysé combien l'imagerie populaire renforce cette conception de l'évolution finaliste, qu'on trouve représentée par de nombreux petits gags qui renforcent l'idée de linéarité du redressement de l'homme (par exemple : ici ou ici ou ici ou ici ou ici ou même ici

Nous avons un plus gros cerveau et des capacités cognitives supérieures, mais la découverte avec se séquençage de notre génome que nous avons si peu de gènes (peut-être seulement 23'000) et récemment que le chimpanzé n'a vraiment pas beaucoup de différences avec nous : 1.23% seulement (Li et al. 2005) en termes de substitution de nucléotides a surpris... et gêné un peu.

D'autres (Pollard et al. 2006 ) ont cherché les zones de notre ADN qui auraient plus varié chez nous que chez le chimpanzé ( par rapport aux autres génomes) et ils ont trouvé très peu de différences notables dans les gènes, mais dans l'ADN non-codant ils ont trouvé des Human Accelerated Regions (HAR) dont l'une semblait avoir particulièrement vite changé : dans une news@Nature Erika Check dit : "It's the junk that makes us human" a propos de cet ADN. Ils ont cherché où et quand est exprimé : il devient ARN -ils parlent de "RNA gene" HAR1F, mais pas une protéine. Il s'exprime entre le 9ème et la 17ème semaine de gestation -période critique où les neurones se forment et migrent- dans une région du cerveau (Cajal-Retzius) qui détermine la structure en couches du cerveau.

Il est tentant d'imaginer que cet ARN aurait un rôle de régulateur et activerait de nombreux autres gènes, assurant le développement accru de notre cerveau et ... nous serions rassurés, surtout !

Pour (Geets 2003), derrière la peur de la différence se cache en fait la peur qu'il ne soit pas si différent... (non je n'ai pas mentionné de politiciens) et cela expliquerait cette recherche de différence et notre soulagement à en trouver.

Sources