samedi 25 août 2007

Un seul gène change le sexe du comportement... chez la souris

Voilà un sujet qui relancera bien des débats entre les hommes et les femmes !

Une équipe menée par C. Dulac à Harvard : (T. Kimchi et al. 2007) ont montré que des souris femelles à qui l'on a désactivé (par knockout) un seul gène, Trpc2, ont les comportements du mâle (de cour et de reproduction, approche, cris ultrasonores typiques, mouvements de copulation, ...) et une baisse des comportements maternels.

Une vidéo (ici) montre bien la femelle sans gène (pas de jeux de mots merci!) (TRPC2 -/-) grise qui monte un mâle (pelage noir).
Ce gène est un canal ionique exprimé dans l'organe voméronasal (VNO) qui détecte les pheromones chez les souris. La suppression chirurgicale de cet organe produit les mêmes effets.

Est-ce que ce gène existe chez l'humain ?

Si l'on regarde dans les base du NIH, par MapViewer, on voit que ce gène existe chez la souris et chez l'homme (entre autres)
  • On voit que le gène est sur le chromosome 11 de la souris (solution)
  • Depuis là un lien vers UniGene, montre des similarités ( 36.2% ce qui est bien significatif) avec TRP3_HUMAN : aussi un récepteur.
  • Chez l'homme un gène du même nom TRPC2 sur le chromosome 11 (solution).
Il n'est pas simple de savoir lequel serait l'équivalent, et il est difficile de trancher, mais il semble être chez nous un pseudogène (cf pubmed) "While encoding an active channel in the mouse, the human TRPC2 appears to be a pseudogene."
Remarquez qu'on est encore une fois en sciences dans les hyopthèses et qu'il faut vire avec ! On peut tout de même relever qu'un gène similaire existe chez nous, et il faudra bien sûr des expériences complémentaires pour montrer son action chez l'homme.

Pas chez nous ?
L'absence (ou sa taille minuscule) d'organe Voméronasal chez l'homme a souvent été donné comme argument contre l'action des phéromones chez l'homme. Le Pr. Ivan Rodriguez (2003) de notre université de Genève a montré que la fonctionnalité de cet organe VNO existe bien chez nous, même si anatomiquement il est vestigial. Nous reviendrons sur ce sujet un de ces jours...

Une question controversée

Sûr que cette publication va relancer le débat entre l'inné / acquis ou génétique / culturel !

Pourtant on commençait juste à les dépasser ( Selon Axel Kahn et Albert Jacquard -ils parlaient de l'intelligence - elle serait 100% acquise et 100% culturelle, signifiant par là que les 2 sont critiques et c'est de leur interaction que résulte le comportement, la caractéristique, ...). Et l'épigénétique (nous en reparlerons...) oblige à nuancer cette dichotomie.

L'illusion du gène du sexe ou "Gay"

Certains vont sans doute interpréter ces résultats comme "le gène du sexe". En particulier les mouvements gays d'un côté ou les fondamentalistes de l'autre, et la presse scientifique à sensation (surveillez Science et Vie avec un titre comme "un seul gène change la femelle en mâle ou des femelles qui se prennent pour des mâles : un gène identifié, ...) (Exemple : le "gène Gay" )

Catherine Dulac dans le Podcast (transcription du texte) voit plutôt le cerveau comme programmé pour les deux sexes et un interrupteur sensoriel activerait l'un ou l'autre des programmes de comportement.

De beaux débats en vue...

L'occasion de montrer que la science bouge, qu'elle est fait d'hypothèses qui s'affinent, se confirment, et progressent ...

De donner envie de savoir, aussi !
"Ce qui n'est pas entouré d'incertitudes ne peut pas être la vérité" Richard Feynmann
Sources
  • Rodriguez, I. (2003). Nosing into pheromone detectors. Nature Neuroscience, 6(5), 438-440.
  • Feynmann Richard(in Postel Vinay , Olivier, une culture remplace l'autre La Recherche 394 février 2006 p. 92)
Updated 27 VIII 07 By F.Lo ( TRPC2 semble être pseudogène chez l'homme )

jeudi 23 août 2007

The Naked Scientists : expériences et questions de science amusante

Avec un titre provocant qui ne déplaira pas forcément aux élèves, The Naked Scientists propose des expériences simples étonnantes et stimulantes et des questions - réponses remarquables.


Quelques exemples
- Ce qu'est le virus de l'herpès et comment s'en protéger
- Est-ce qu'une pastille à la menthe chaude a une saveur froide ?
- Comment le système lymphatique fonctionne
- Comment faire une camera avec une bouteille en PET ?
- Comment ouvrir une canette de cola sans se faire asperger : tapoter au bon endroit... !
- les corn flakes contiennent du fer : ne sont-ils pas attirés par un aimant ? ( ne répondez pas trop vite !)
-comment soulever un verre plein de riz dans le toucher.
-Pourquoi les raisins secs montent toujours au dessus du muesli dans le paquet ?
-La question qu'on ne nous pose jamais: Pourquoi les pics n'attrapent pas une commotion en tapant du bec sur des troncs, alors que l'accélération lors de l'impact est de 1200g !
-les sables mouvants, les orages, les bioplastiques etc
le secteur biologie est ici

Ils ont aussi un Podcast : pour vous abonner, introduire dans iTunes cette adresse (menu Avancé , s'abonner au podcast... ) http://www.thenakedscientists.com/naked_scientists_podcast.xml

mercredi 22 août 2007

Les limites du coma redéfinies ?

Les limites du coma redéfinies ?

Un article récent dans news@Nature (Hopkin, 2007) donne l'occasion de faire un tout petit review sur les limites de la conscience et du coma et d'ouvrir quelques pistes sur la question. Les travaux de Schiff et al. du Weill Cornell Medical College à New York , viennent de montrer comment une stimulation électrique du Thalamus à pu faire réagir un homme de 38 ans qui était resté dans un état de conscience minimale causé par un traumatisme crânien suite à une aggression 6 ans auparavant. On a pu lui faire nommer des objets, faire des gestes avec les mains et mâcher sa nourriture sans l'aide du tube qui servait à le nourrir.
Une Stimulation du thalamus pourrait aider certains patients à regagner la conscience (sourceCLEVELAND CLINIC)

Ces effets ont pu être observés plusieurs semaines durant. Et durent en partie entre les stimulations. Cependant, on peut pas parler de guérison.

Qu'est-ce que le coma ?

Dans ce cas ils n'emploient pas le terme de coma. On sait combien cet état fascine et combien les proches veulent garder espoir que le patient sorte d'un état qui est si semblable au sommeil. (Voir par exemple Kamo de Pennac et l'affaire Terri Schiavo qui avait subi en 1990 des dégâts par manque d'oxygène suite à un arrêt cardiaque. Une affaire juridique a opposé son mari qui voulait retirer le tube qui la nourrissait à G.W. Bush.
En principe on suppose qu'ils ont peu de chances de récupérer si on n'observe pas de progrès durant les 12 premiers mois de rehabilitation. Il y a des exceptions : le cas incroyable d'un cheminot polonais qui est sorti du coma après 19 ans (wikipedia) et découvre que la communisme est fini ! (intranet)

Un très bon article (intranet) de Shadlen (2007) fait le point et dissocie notamment Coma, état végétatif persistant et état minimalement conscient
  • Coma : le patient semble endormi mais ne peut pas être réveillé. Il n'y a pas de réactions ni de mouvement organisé , même pas pour écarter une irritation. Seules manifestations : les réflexes médullaires et du tronc cérébral.
  • État végétatif persistant (PVS) : similaire au coma, mais le patient semble parfois ne pas être endormi : p. ex. les yeux s'ouvrent et roulent de manière incohérente. le cortex n'est pas actif, ou seulement des ilôts dysfonctionnels ou déconnectés.
  • État minimalement conscient (MCS) : Plus que le PVS, le patient montre des signes occasionnels d'éveil ou de comportement organisé. Certaines zones du cortex pourraient fonctionner.
Ce traitement suggère que chez cette personne au moins le cortex était peu endommagé, restait potentiellement activable, mais ne s'activait pas, et que le Thalamus (certains centre du...) jouerait un rôle clé dans l'activation de l'état de veille.
On voit bien -dit Shadlen - que quand on dort une partie de notre encéphale est active : certains bruits nous réveillent d'autre pas ( les mamans qui dorment dans le bruit des villes mais que le moindre gémissement de leur bébé réveille comprendront).

Au fond pour connaître le pronostic, la question devient de savoir si le cortex est lésé et ne fonctionne plus ou si il n'est simplement pas activé. Clairement cette thérapie pourrait être envisagée dans le second cas seulement.

En revenir ?
Récemment Nature avait publié des travaux montrant qu'un somnifère pourrait sortir certains patients en PVS, (Un somnifère réveille les patients dans un état végétatif !)
Un autre avait décrit comment l'IRMf pouvait mettre en évidence des signes d'activité cérébrale chez des patients.(intranet)
Chez un patient végétatif, les zones habituelles s'activent lorsqu'on lui demande de s'imaginer en déplacement ou jouer au tennis (source NEUROIMAGE, ELSEVIER)

Pour certains tout cela justifie qu'on maintienne ces patients artificiellement en vie, puisque certains en ressortent. Pour d'autres, passé une certaine limite il s'agit d'acharnement thérapeutique, par égard pour les patients, leur famille ou à cause du coût qui pourrait être mieux investi chez nous ou ailleurs.
Tous ces points de vue sont respectables, non ?

Ce qui est sûr c'est que les limites de ce qu'est la conscience sont toujours plus difficiles à cerner...

Sources

mercredi 8 août 2007

Le retour de la fièvre aphteuse : fuite d'un labo suspectée.

La maladie bovine et porcine de la fièvre aphteuse ( foot and mouth disease) a été détectée le 3 août dans une ferme du Surrey.
Cette maladie virale est très contagieuse (elle peut se disséminer par l'air, les chaussures, les pneus, etc. ) dangereuse pour le bétail et parfois mortelle pour les jeunes animaux. La question est très sensible en Grande-Bretagne, car il avait fallu éliminer 6 millions d'animaux lors de la dernière épizootie en 2001.
Le virus FMDV est un virus à ARN monobrin de 7.2-8.4 kbases La séquence du type Asia est ici

Elle se manifeste entre autres par de la fièvre, des aphtes sur la bouche ( d'où son nom) et des cloques sur les pieds.


La transmission à l'humain est extrêmement rare,(le dernier cas remonte à 1966); le virus ne résiste pas à l'acide gastrique. C'est par contre un grand problème pour les éleveurs.
Selon les premières analyses, cette souche est similaire à celle nommée 01 BFS67 qui avait été isolé il y a 40 ans lors de l'épizootie de 1967.
Or elle est utilisée dans deux laboratoires à Pirbright, à environ 4 miles (6.4km) de la ferme affectée. Evidemment cela suscite des questions !
Pourtant ce sont des labos de catégorie 4 (DEFRA) avec des mesures très strictes (travail en combinaisons, douche, labo en dépression, filtrage de l'air, etc.)

Pourquoi ne pas vacciner ?

La question est très controversée : le problème principal est que les vaches vaccinées ne sont pas faciles à distinguer des vaches atteintes : le test les confond et on interdit la vente des bêtes vaccinées !

Cela ferait une belle question : Pourquoi le vaccin rend-il positif au test ? De quel genre de test pourrait-il s'agir ? Comme on teste la présence d'anticorps, quelle similitude entre le vaccin et la maladie cette confusion met-elle en évidence ?

Un nouveau test développé à Tübingen en 2003 serait capable de distinguer les animaux vaccinés et les malades, mais tant que les tests qui déterminent si un pays est autorisée à l'exportation, pour la viande ne sont pas modifiés, personne ne va vacciner, puisque cela risquerait de mettre le pays sur la liste rouge !
De quel type de test pourrait-il s'agir ?
La PCR sur une séquence du virus me vient à l'esprit.

Une autre difficulté est la variabilité du virus : comme pour le SIDA on n'arrive pas à faire un vaccin contre toutes les variantes du virus.

Références
  • Cressey, Daniel, 2007, Foot and mouth disease returns to the UK Nature news: 6 August 2007; | doi:10.1038/news070806-1
  • Doctissimo : La fièvre aphteuse en 10 questions
  • Wikipédia fièvre aphteuse
  • Un ouvrage spécialisé : Frank, Steven A. "Immunology and Evolution of Infectious Disease" : librement disponible. Infos sur l'évolution de la maladie ici ( et au complet en pdf )