mercredi 31 décembre 2008

Voeux de bonheur et prospérité...

Le bonheur de l'argent c'est de le donner !

A l'heure où les voeux de bonheur et de prospérité sont échangés par millions, la question du lien éventuel entre bonheur et argent se pose.
Borrell, Brendan. (2008). dans une news de Nature Money buys happiness apporte quelques éléments de réponse : On savait que l'argent ne fait guère le bonheur : passé une seuil minimal, les gens plus aisés ne sont que très très légèrement plus heureux. On savait aussi que les gens moins aisés donnent un plus grand pourcentage de leur revenu.

Mais que faire de cet argent pour être plus heureux ?
le bonheur de l'argent c'est de le donner
Figure 3 : Le bonheur de l'argent c'est de le donner Source : Nature. Punchstock

Elizabeth Dunn, psychologue à l'University of British Columbia in Vancouver, a étudié le lien entre revenu, donations de bienfaisance et bonheur.
En moyenne sur 632 Américains, ils ont trouvé qu'ils dépensaient 10% du budget allait à des dépenses "prosociales" — des dons de bienfaisance et des cadeaux à des amis .
Dans cette étude et une autre sur la manière de dépenser les Bonus reçus, le revenu n'avait pas de lien avec le bonheur, mais les dépenses prosociales oui

La question restait ouverte de savoir si c'est les gens heureux qui dépensent plus dans le prosocial ou si c'est de dépenser prosocialement qui rend heureux.
Les chercheurs ont alors distribué à 46 étudiants une enveloppe avec $5 ou $20, et leur ont dit à la moité d'entre eux de dépenser l'argent pour eux et à l'autre moitié de le dépenser pour des amis ou des dons prosociaux.. Le soir il est apparu que ceux qui avaient donné leur argent étaient plus heureux que ceux qui l'avaient dépensé pour eux-mêmes. Le montant reçu n'avait pas d'effet sur leur bonheur.

Ce qui est ironique ajoute Dunn, c'est que si on voit l'argent comme un moyen d'obtenir le bonheur, on risque moins de le donner, et on se prive alors de ce bonheur-là ...

Les voeux des BioTremplins pour 2009

A tous mes voeux de bonheur c'est à dire de prospérité ... à partager, de rires et de joies... pour être en meilleure santé et de chaleur des mains... pour voir les autres plus positivement.

;- )

Sources :

  • Borrell, Brendan. (2008). Money buys happiness | Nature News 20 March 2008| doi:10.1038/news.2008.684
  • Dunn, E. W., Aknin, L. B. & Norton, M. I. Science 319, 1687-1688 (2008). | Article |

Voeux de bonheur et de chaleur...

Alors qu'ici en Suisse la neige tombe sur la fin de l'année, que nombreux sont ceux qui ont été skier et se réchauffent les mains avec un chocolat chaud, ou un vin chaud, ...

Le dicton "mains froides, coeur chaud" a-t-il un fond de vérité ?

Une recherche récente suggère plutôt l'inverse... que de se chauffer les doigts avec une tasse chaude ou une chaufferette incite à juger les autres plus favorablement et à agir plus généreusement.

chaleurFigure1 : Se chauffer les mains rend plus chaleureux. Credit: Brigitte Sporrer/Zefa/Corbis

Sur la base d'une news de Sara Coelho dans ScienceNow. Lawrence Williams de l'University of Colorado, Boulder, a demandé à 41 étudiants de venir pour une expérience, et on leur a fait tenir une tasse un moment, puis décrit une "personne A" fictive. Ensuite on leur a demandé d'évaluer cette personne sur 10 critères depersonnalité : ceux qui avaient tenu une tasse chaude étaient beaucoup plus enclins à décrire "A" comme "généreux", "attentionné "ou "sociable" que ceux qui avaient tenu une froide.
Dans une autre expérience 53 personnes ont été recrutées pour une évaluation de produit, et ont tenu une chaufferette chaude ou froide puis on leur a demandé évaluer le produit. A la fin on leur a donné le choix d'une récompense pour eux ou un bon a donner à un ami. 54% de ceux qui ont eu la chaufferette chaude ont choisi le bon-cadeau contre 25% de ceux qui ont eu la froide.
Ainsi la perception de chaleur a un influence claire sur les perceptions et les comportements sociaux. Des publicistes ont déjà envisagé que donner des échantillons chauds pourrait être plus efficace pour donner une image positive du produit...
Tomas Chamorro-Premuzic, un psychologue du comportement des consommateurs à l'University of London's Goldsmiths College, met toutefois en garde : il faut vérifier que cet effet s'applique aussi à des populations différentes et dans différentes circonstances.

Sources :

samedi 20 décembre 2008

Une plie qui venait du froid...

Des protéines antigel ? Pour ceux de nos lecteurs qui sont loin de l'Europe, il a beaucoup neigé cette année ici, et la question du froid et du gel est ... pointue.

Cristaux
Fig 1 : la glace forme facilement des cristaux pointus. (Photo F. Lombard)

Un article de Science et Vie Junior (intranet.jpg) décrit comment on pourrait introduire le gène antigel de la plie chez la tomate.

Susciter des questions ?

Ce texte intéresse facilement et peut faire apparaitre chez les élèves - ceux que le gavage de réponses n'a pas encore lobotomisés du questionnement - un certain nombre de questions.
  • Pourquoi la plie aurait -elle un gène contre le froid ?
  • Comment un gène pourrait empêcher un phénomène obéissant aux lois de la physique, aussi peu vivant que le gel ?
  • Le gène de la plie fonctionnera-t-il dans une plante ?
  • Ne donnerait-il pas un goût de poisson aux tomates ?
  • A quoi ça peut servir ?
  • ...
C'est un bon texte pour susciter les questionnement, mais il ne donne pas les réponses.
L'accès électronique à de nombreuses ressources permet de trouver facilement d'autres textes où trouver (ou faire trouver) les réponses... des réponses de qualité !

Dévulgarisons ?

Une recherche sur PubMed qui recense pratiquement TOUT ce qui est publié en biosciences a porté ses fruits :
Il semble que ce soit suite à cet article que S&V ait fait cet encadré.
Marshall, C. B., Fletcher, G. L., & Davies, P. L. (2004). Hyperactive antifreeze protein in a fish. Nature, 429(6988), 153-153.


On y apprend que ces protéines (AFP : AntiFreeze Proteins) protègent le sang du poisson du gel en se fixant sur les surfaces pyramidales des cristaux empêchant ainsi les aiguilles de glace de se former. (Ce sont ces cristaux qui perforent les membrane et causent les dégâts aux cellules). Cela permet de repousser le gel de 2 °C

Fig 2 : La protéine antigel empêche la production de cristaux de glace en aiguille. b)Dans son sérum on en trouve peu de pointus (Y et Z). La protéine s'y accroche et produit des glaçons plutôt arrondis (X) Source : Marshall, C. B. et al (2004).

" Fish that live in the polar oceans survive at low temperatures by virtue of 'antifreeze' plasma proteins1 in the blood that bind to ice crystals and prevent these from growing. However, the antifreeze proteins isolated so far from the winter flounder (Pleuronectes americanus), a common fish in the Northern Hemisphere, are not sufficiently active to protect it from freezing in icy sea water. Here we describe a previously undiscovered antifreeze protein from this flounder that is extremely active (as effective as those found in insects) and which explains the resistance of this fish to freezing in polar and subpolar waters."

Plus loin l'article explique que la forme de la protéine (principalement constituée de beta-helix) aligne bien la régularité de sa structure chimique avec celle de la surface du glaçon et prévient ainsi la croissance du glaçon ou empêche les pointes de se former. Certains insectes ont des AFP très voire plus efficaces encore. Davies, Peter L et al. (2002). illustrent bien comment la structure de ces protéines est adaptée à la régularité du maillage cristallin de la glace.



Source Davies, Peter L et al. (2002).

Quelle plie ?

La plie mentionnée n'est pas celle que nous connaissons : c'est une espèce spéciale Winter flounder Pseudopleuronectes americanus on la trouve dans les mers polaires cf dans taxonomy bowser de Barcode of Life Data Systems (BOLD) ici (répartition et photos)


Fig 6 : La plie des océans polaires Pseudopleuronectes americanus qui produit cette protéine antigel.

Quelle protéine ?

Cette protéine-là peut être trouvée dans la base de UniProt (ex-SwissProt née à l'UniGe) semble s'appeler HPLC-6
http://www.uniprot.org/uniprot/P04002
-on y trouve la fonction :Antifreeze proteins lower the blood freezing point.
-et la séquence d'acides aminés : la séquence authentique !
Qu'elle soit si facilement accessible peut aider à rendre les sciences en classe plus connectées au monde réel de la biologie actuelle.

        10         20         30         40         50         60 
MALSLFTVGQ LIFLFWTMRI TEASPDPAAK AAPAAAAAPA AAAPDTASDA AAAAALTAAN 
        70         80 
AKAAAELTAA NAAAAAAATA RG 

Rem : Il s'agit du code des acides aminés à une lettre : une conversion du code 1 à 3 lettres est par exemple proposé par l'uni Alberta.| One-to-three | Three-to-one
et un Tableau des Abbrévitaitons acides aminés à une lettre/ 3lettres

(M.à J.) Une autre glycoprotéine antigel est décrite plus à fond dans l'instantané du mois de Prolune :
  • Ice-structuring glycoprotein, Notothenia coriiceps neglecta (Yellowbelly rockcod) : P24856
"Comment fonctionnent de telles protéines antigel ? Elles empêchent les cristaux de glace naissants de grossir. Pour agir, elles bénéficient d’une structure particulière : la succession de trois acides aminés (thréonine-alanine (ou proline)-alanine) répétée un grand nombre de fois. Et sur chaque thréonine se greffe une molécule de sucre, ce qui confère aux protéines une certaine affinité pour les molécules d’eau. Les glycopeptides antigel se sentent irrésistiblement attirées par les molécules d’eau prises dans le cristal de glace balbutiant. Elles se positionnent alors de telle sorte qu’une seule face de la protéine interagisse avec la glace. De ce fait, le cristal recouvert d’antigel ne peut ‘recruter’ des molécules d’eau supplémentaires et sa croissance est interrompue. "

1wfaQuelle forme ?

On peut accéder à la structure 3-d de cette protéine par la base de données de structures PDB : ici
On voit bien la régularité de ce béta-helix et on peut le faire tourner dans l'espace avec le lien Jmol dans la page a droite.

A quoi ça sert de transférer ce gène dans une tomate ?

Pour comprendre comment le vivant s'est adapté, c'est intéressant. Comme expérience mentale pour comprendre et expliquer que ce gène sera lu comme n'importe quel autre gène,de la tomate, et produira la même protéine HPLC-6 mais ne donnera pas une odeur de poisson, c'est intéressant, oui.
Mais à quoi peut servir de transférer ce gène dans une tomate... là franchement je suis perplexe... elle ne peut guère pousser dans des climats où il risque de geler il me semble ?
Peut-être à protéger du gel certaines autres cultures sensibles (fraises ? Abricots ?). Si le consommateur les accepte.
A mieux conserver des produits sanguins ou des organes durant le trajet en vue de leur transplantation, voire du sperme congelé dans des banques.
A mieux comprendre le vivant sans aucun doute !


Nous voilà armés pour affronter - mentalement plus pointus - la neige et la glace de cet hiver ?

Sources :

lundi 8 décembre 2008

Envie de ... gagner le prix Nobel?

D'accord vous ne souhaitez ou n'espérez pas le prix Nobel ...

Quand même c'est un évènement scientifique qui parvient à intéresser les médias, et qui peut aider à motiver indirectement les jeunes pour les sciences... En montrant de grandes choses qui s'y découvrent. En aidant à voir comment la recherche fondamentale a des effets dans la vie quotidienn.
Rappelons que le prix Nobel de médecine 2008 a été attribué à
  • Harald zur Hausen pour la découverte du HPV human papilloma virus contre lequel une campagne de vaccination est en cours dans les écoles
  • Françoise Barré-Sinoussi et Luc Montagnier pour le virus du SIDA le VIH
Ainsi les recherches -souvent obscures - permettent à la longue des applications comme le vaccin HPV pour protéger chacune des adolescentes, et la connaissance du VIH a ouvert la voie pour des recherches et finalement des traitements qui - faute hélas de guérir- sauvent quand même d'innombrables vies.

Venez discuter ... qu'est ce Prix Nobel en fait ?

Café scientifique, le LUNDI 15 DECEMBRE 2008 à 18h30
Musée d'histoire des sciences
(dans le Parc de la Perle du lac)
Trams 13 et 15, arrêt Butini / Bus 1, arrêt Sécheron, Parking adjacent.

ENTREE LIBRE


ENVIE DE ... GAGNER LE PRIX NOBEL?


Cet automne, comme chaque année depuis 1901, s'est déroulé le rituel le plus célèbre en science : l'attribution du prix Nobel. Les médias relayent alors l'événement, la communauté scientifique congratule, la politique s'en félicite et le grand public s'émerveille devant les heureux gagnants de ces « Jeux olympiques des sciences » qui se voient remettre leur distinction à Stockholm par le roi de Suède le 10 décembre, anniversaire de la mort d'un fameux inventeur de dynamite qui légua sa fortune pour fonder ce prix.


Mais pourquoi, au juste, le Nobel est-il décerné ? Et pourquoi à un chercheur, certes méritant, plutôt qu'à un autre, tout aussi brillant ? Qui, parmi le public, les médias ou même les collègues scientifiques, peut vraiment comprendre, ou expliquer, une recherche « nobélisée » ? Est-ce que le prix Nobel est désintéressé ? Impartial ? International ? Idéologiquement neutre ? Est ce qu'il crée un culte de la personne ? Qu'en est-il des équipes autour de chaque chercheur et de leurs apports indispensables ? Et quid des oubliés, des méprisés, des thèmes boudés ? Des scientifiques femmes ? Des pays émergents ? Des scandales ? Que de questions... que vous pourrez venir poser et débattre avec nous ce soir-là.

Avec notamment la participation de :
Jean-Louis CARPENTIER, Doyen de la Faculté de médecine de l'Université de Genève et Vice-Président du Conseil de la fondation Louis-Jeantet
Jan LACKI, professeur à l'Université de Genève, historien et philosophe des sciences
Marie-Christine PETIT-PIERRE, journaliste scientifique au « Temps »

Animation :
Alexander WENZEL, physicien et littéraire .
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Plus d'informations sur l'activité de Bancs publics sur notre site http://www.bancspublics.ch

mardi 2 décembre 2008

Les autres se le permettent bien... !

Un environnement dégradé incite à l'incivilité

Dans une nouvelle de la revue Science, Holden (2008) rapporte une recherche qui confirme et précise ce que beaucoup soupçonnaient : dans un environnement sali, couvert de graffitis, ou de voitures mal parquées les gens sont beaucoup plus enclins à commettre des incivilités. On parle d'"effet carreau cassé" Wilson, et al. (2003).

Par une série d'expériences soigneusement conçues, Keizer, K. et al. (2008). de l'Université de Groningen aux Pays-bas ont pu confirmer que lorsque les gens voient une norme sociale transgressées, ils sont beaucoup plus nombreux à en transgresser eux-mêmes une autre.
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Figure 1 : Indices d'incivilité. Les gens sont plus enclins à jeter leurs papiers par terre dans une rue ornée de graffitis que dans une rue propre. Credit: Anthony Cooper/Ecoscene/Corbis

Graffitis et effet papillons par terre...

L'une de leurs expériences, par exemple, étudie l'effet des graffitis sur la civilité. Dans une allée sans poubelle où un écriteau interdisait les graffitis, ils ont attaché des papillons publicitaires aux vélos parqués (on sait combien ils sont répandus là-bas) et ont discrètement observé dans cette allée sans graffiti combien ont jeté ces papiers par terre ou les ont déposés sur un autre vélo plutôt que de les empocher. Un autre jour ils ont répété l'expérience mais avec des graffiti sur les murs.
Dans l'allée sans graffiti, ils ont observé qu'un tiers des 77 cyclistes jetaient leurs papier par terre, contre plus des deux tiers lorsque le mur était orné de graffitis.

Fig 2 : Les papillons sont jetés par terre plus souvent dans un environnement transgressif Source : Keizer, K. et al. (2008)

Moins honnête en présence de détritus ...

Dans une autre expérience, ils ont observé que 13% des passants empochaient un billet de 5€ qui dépassait d'une boîte aux lettres dans un environnement propre contre 23% dans un environnement jonché de déchets.

Fig 3 : le billet de 5€ est volé plus souvent dans un environnement transgressif Source : Keizer, K. et al. (2008)

L'environnement sonore peut aussi influencer le comportement : quatre sur cinq jetaient leur papier lorsque des bruits de pétards (illégaux là-bas) résonnaient dans les environs conter moins de la moitié dans un environnement calme.
D'autres expériences ont porté sur le retour des chariots de supermarché ou les automobilistes franchissant une barrière marquée passage interdit pour rejoindre plus vite leur auto.

Fig 4 : les chariots sont laissés sur place et les interdictions de passer franchies plus souvent dans un environnement transgressif Source : Keizer, K. et al. (2008)

Gestion urbaine soft ou l'exemple des adultes ?

Une étude de l'université de Harvard, par Braga, A. et al. (2008) a montré qu'une prévention situationnelle visant à un maintien "soft" de l'ordre en général dans des quartiers chauds de Lowell au Massachusetts a produit plus d'effet que les services sociaux ou la répression. Si certains parlent de social engineering, les biologistes parleraient volontiers d'éthologie humaine appliquée...

Le désordre dans l'environnement urbain a un effet généralisé dit le psychologue social Robert Cialdini de la State University, Tempe. Et que des effets importants peuvent être obtenus avec des efforts relativement mineurs. Ses recherches montrent qu'on peut influencer le comportement dans le sens souhaité en leur indiquant que les autres le font. En indiquant que la plupart des usagers réutilisent leurs linges dans les hôtels ils font grimper fortement ce taux.

L'ensemble de ces expérience confirme une sorte de calibrage des comportements, une adaptation avec le milieu : l'observation que les autres respectent les règles incite à les respecter soi-même. (Il semble que ce phénomène soit bien connu des psychologues).

On peut le lire dans les deux sens : pour les uns cela justifie une politique de maintien de l'ordre contre les grafitis, pour d'autres cela suggère de mettre l'accent sur une politique de l'exemple par les adultes.
Il serait intéressant de voir si il y a plus de graffitis là où les voitures sont mal parquées, et si de voir une attitude respectueuse des règles par les adultes incite aussi les jeunes à moins d'incivilités...

Sources