mardi 25 mars 2025

Vous avez manqué une des conférences de la semaine du cerveau 2025 ... tout n'est pas perdu !

(Re)voir les conférences de la semaine du Cerveau 2025

Vous avez manqué les excellents conférences de la semaine du cerveau, ou vous aimeriez en montrer des extraits en classe … 
C'est moins bien qu'en vrai,... mais vous pouvez les revoir par internet. Sur mediaserver depuis ici


--

JTS pourquoi ce cercle vicieux démangeaison-gratter-démangeaison

 Itching for relief. More than 50 diseases can cause itchy misery. Orrling/Creative CommonsLa démangeaison a un double rôle : pathologique et adaptatif.

 

Dans une news de Science, Emily Underwood (ici) situe le problème : "Toutes les démangeaisons ne disparaissent pas en se grattant. Environ 15 % des individus souffrent de prurit chronique, souvent dû à des pathologies ou à des traitements médicamenteux. Par exemple, les patients atteints de cancer en phase terminale sous morphine ressentent parfois des démangeaisons si intenses qu'ils préfèrent renoncer à l'analgésie.
Des chercheurs ont identifié une hormone chez la souris impliquée dans la transmission du prurit aux neurones de la moelle épinière, relayant ensuite le signal vers le cerveau. Cette découverte pourrait mener à de nouveaux traitements contre le prurit chronique. Elle indique que "Se gratter là où ça démange entraîne un cycle sans fin d'irritation et de soulagement.  Une nouvelle étude éclaire les avantages et les inconvénients de ce phénomène." ça n'explique pas beaucoup les mécanismes biologiques. "Traduction JTS aidé par l'IA Jump-To-Science : donner envie d'accéder aux articles                plutot que vulgariser encourage le lecteur à aller vérifier dans l'article d'origine :  ici.

Liu,et al. (2025) ici sont plus explicites " Se gratter est un comportement instinctif et conservé (c.-à-d. qu'on le trouve chez de nombreuses espèces, ce qui suggère qu'il aurait été maintenue par sélection au cours de l'évolution) en réponse à la sensation de démangeaison. Dans des maladies comme la dermatite (eczéma), la démangeaison chronique (prurit) est un symptôme majeur qui aggrave l'inflammation. Bien que se gratter intensifie souvent les lésions cutanées, cela procure aussi un soulagement, suggérant un bénéfice [évolutivement] adaptatif." Traduction JTS aidé par l'IA Jump-To-Science : donner envie d'accéder aux articles                plutot que vulgariser encourage le lecteur à aller vérifier dans l'article d'origine :  ici.

Rationale (ce qu'on ne sait pas encore et que cette recherche tente de comprendre)

Dans la peau, les mastocytes dermiques activés jouent un rôle clé dans la réponse allergique cutanée, provoquant des éruptions et des démangeaisons, ce qui entraîne un comportement de grattage. Les mastocytes recrutent également des cellules inflammatoires et renforcent la défense de l'hôte contre Staphylococcus aureus. Les mastocytes peuvent être activés par divers mécanismes, notamment par des allergènes qui lient les anticorps IgE pré-existantsau récepteur FcεRI (molécules centrales du mécanisme d'activation de la réaction aux parasites - qui s'active à tort lors de l'allergie) , ou encore par la substance P (SP),  un neuropeptide libéré par les neurones sensoriels de la douleurTrpv1 (cf figure 1).

Scratching synergizes with FceRI mast cell activation to drive allergic skin inflammation. Crosslinking of FceRI or IgE on mast cells by allergens or S. aureus activates mast cell release of pruritogens (itch-inducing factors) that are sensed by MrgprA3-expressing neurons. Scratching resulting from itch sensation activates Trpv1-expressing neurons to release the neurotransmitter SP. SP acting through MrgprB2 on mast cells synergizes with FceRI to enhance mast cell release of TNF, resulting in enhanced cutaneous inflammation and increased S. aureus host defense. [Figure created with BioRender.com]

Fig 1: Le grattage agit en synergie avec l'activation des mastocytes via le récepteur FcεRI pour amplifier l'inflammation cutanée allergique. L'interaction des allergènes ou de Staphylococcus aureus avec le récepteur FcεRI ou les IgE sur les mastocytes déclenche la libération de pruritogènes (facteurs induisant la démangeaison), qui sont détectés par les neurones exprimant MrgprA3. Le grattage, provoqué par la sensation de démangeaison, active les neurones exprimant Trpv1, entraînant la libération du neurotransmetteur SP (substance P). La SP, en agissant via le récepteur MrgprB2 sur les mastocytes, potentialise l'activation du FcεRI, augmentant ainsi la libération de TNF par les mastocytes. Cela entraîne une inflammation cutanée accrue et une amélioration de la défense de l'hôte contre S. aureus.  [Figure créée avec BioRender.com]  [img]. Source :Liu,et al. (2025) ici


Les effets de cette activation des mastocytes en réponse aux allergènes et aux infections par Staphylococcus aureus, ainsi que la manière dont le grattage favorise l'inflammation cutanée, et la question de savoir si le grattage est bénéfique pour l'hôte restent mal compris.Traduction JTS aidé par l'IA Jump-To-Science : donner envie d'accéder aux articles                plutot que vulgariser encourage le lecteur à aller vérifier dans l'article d'origine :  ici.


Fig 2: La bactérie Staphylococcus aureus (rouge et jaune) sur la peau humaine. Credit: Steve Gschmeissner/S  [img]. Source :Sohn, E. (2018).ici:

RÉSULTATS

Emily Underwood (ici) résume : Pour analyser ce cycle, les chercheurs ont appliqué des allergènes sur les oreilles de souris afin d'induire une dermatite, une inflammation cutanée. Certaines souris ont été autorisées à se gratter librement, tandis que d'autres portaient un collier les empêchant d'atteindre leurs oreilles. Les chercheurs ont constaté que les souris capables de se gratter présentaient une inflammation plus marquée et une réponse immunitaire renforcée, mais hébergeaient moins de Staphylococcus aureus, une bactérie pathogène connue pour provoquer des infections cutanées, par rapport aux souris incapables de se gratter. "Traduction JTS aidé par l'IA Jump-To-Science : donner envie d'accéder aux articles                plutot que vulgariser encourage le lecteur à aller vérifier dans l'article d'origine :  ici.

CONCLUSION

"Le cycle démangeaison-grattage est un processus pathogène dans les éruptions cutanées allergiques, telles que la dermatite ou les réactions aux piqûres d'insectes. Ce cycle amplifie l'inflammation et aggrave la maladie. Nos données suggèrent que le grattage active les neurones cutanés à Trpv1, qui sont une source majeure de Substance P dans la peau. L'activation coordonnée des mastocytes agit en synergie pour renforcer l'inflammation. Ainsi, les mastocytes dermiques jouent un rôle central dans l'inflammation cutanée et sont capables d'intégrer à la fois des signaux neuro-immuns adaptatifs et innés.
De plus, le grattage induit par l'inflammation peut réduire l'abondance de certaines bactéries commensales de la peau et, dans le contexte d'une infection superficielle par S. aureus, l'inflammation déclenchée par le grattage améliore la défense de l'hôte. Ces données illustrent comment le grattage peut à la fois aggraver la maladie et bénéficier à l'hôte via un axe neuro-immunitaire, conciliant ainsi son rôle paradoxal de processus pathologique et d'adaptation évolutive.
" Traduction et résumé JTS aidé par l'IA Jump-To-Science : donner envie d'accéder aux articles                plutot que vulgariser encourage le lecteur à aller vérifier dans l'article d'origine :  ici.

PERSPECTIVES

"L'immunologiste Aaron Ver Heul, de la Washington University School of Medicine à St. Louis, qui n'a pas participé à l'étude, déclare à Nature que l'identification du circuit neuronal sous-jacent au « cercle vicieux du grattage » ouvrira la voie à des traitements plus efficaces pour interrompre ce cycle.(ici)



(Les membres Jump-To-Science peuvent obtenir ces articles).

Références:

  • Liu, A. W., Zhang, Y. R., Chen, C.-S., Edwards, T. N., Ozyaman, S., Ramcke, T., McKendrick, L. M., Weiss, E. S., Gillis, J. E., Laughlin, C. R., Randhawa, S. K., Phelps, C. M., Kurihara, K., Kang, H. M., Nguyen, S.-L. N., Kim, J., Sheahan, T. D., Ross, S. E., Meisel, M., … Kaplan, D. H. (2025). Scratching promotes allergic inflammation and host defense via neurogenic mast cell activation. Science, 387(6733), eadn9390. https://doi.org/10.1126/science.adn9390
  • Sohn, E. (2018). Skin microbiota's community effort. Nature, 563(7732), S91‑S93. https://doi.org/10.1038/d41586-018-07432-8
  • Underwood, E. (2025). The Secret of the Itch | Science | AAAS. Science. https://doi.org/10.1126/article.25905

Activités pour les enseignants : Au CERN / au Bioscope / Avec les Naturalistes


Au CERN
Les activités qui pourraient intéresser vos élèves 

Les super-pouvoirs de l'Univers - Ateliers BD et sciences

Mercredi 9 avril 2025
13:30 - 15:00 ou 15:30 - 17:00
Au campus du Portail de la science du CERN 
Français

À partir de 10 ans

Inscriptions : indico.cern.ch/e/ateliers-bd

En marge de l'événement public Super Quantum ! qui se tiendra au CERN le mercredi 9 avril à 20h00, le dessinateur de bandes-dessinées Laurent Schafer, auteur des BD de vulgarisation scientifique à succès Quantix, Infinix et plus récemment Cosmix, conduira deux ateliers destinés aux 10 - 14 ans l'après-midi du 9 avril. Les ateliers se feront en deux parties :

La première partie sera axée sur la théorie et donnera une formation express de super-héros de l'Univers aux jeunes, avec une démonstration en direct d'une création de BD par l'auteur. 

La deuxième partie invitera les participants à imaginer et à créer une histoire avec un super-héros dans un strip BD de 3 à 4 cases. 

 

Girls in ICT - Atelier informatique pour les filles 

Samedi 26 avril 2025

09:30 - 11:00 ou 11:00 - 12:30 ou 13:30 - 15:00 ou 15:00 - 16:30
Au campus du Portail de la science du CERN 
Français

À partir de 12 ans

Inscriptions : indico.cern.ch/e/girls_in_ict

À l'occasion de la Journée internationale Girls in ICT, le CERN propose des ateliers spécialement conçus pour encourager les filles à explorer le monde du numérique et de l'informatique.

À travers des témoignages inspirants, des ateliers interactifs et des rencontres avec des professionnelles du secteur, cet événement vise à déconstruire les stéréotypes et à encourager les futures générations à oser le digital !

Atelier 1 - Intelligence Artificielle pour l'aide à la narration

Atelier 2 - Intelligence Artificielle pour l'analyse des mouvements 


Autres activités disponibles

Invitez un chercheur ou une chercheuse du CERN à donner une conférence sur son métier directement dans votre classe !

Le CERN offre aux enseignant·e·s et à leurs élèves la possibilité de participer en direct, depuis chez eux ou depuis la salle de classe, à une visioconférence sur le Laboratoire, donnée par un scientifique du CERN

Retrouvez également les conditions de participation, les procédures d'inscription et toutes les informations pratiques de nos autres activités pour les scolaires sur https://voisins.cern/fr/offers.


Événements à venir – À vos agendas !

Les informations sur les événements à venir seront disponibles sur https://voisins.cern/fr/upcoming_events au fur et à mesure de l'ouverture des inscriptions.

Vous recevez ce courriel car vous avez demandé à être ajouté à la liste de diffusion des offres éducatives à destination des écoles locales du CERN. Vous pouvez vous désinscrire en cliquant sur se désinscrire. Votre adresse électronique est uniquement utilisée pour vous fournir des informations sur les offres éducatives du CERN ; elle ne sera partagée avec aucun tiers.

 


Savourer la Nature et mieux la connaître ( pour y emmener ses élèves ?)

Amies curieuses (et inversement),
Amis curieux (pareil),

Nous profitons de lever notre nez amoureux des violettes printanières pour vous annoncer la parution du programme de la Formation Naturaliste 2025.

Les inscriptions se font par l'agenda de ProNatura Genève.

En espérant vous y voir venir, découvrir et sourire, nous vous souhaitons un joyeux printemps.

A bientôt j'espère.

Laurent Burgisser
www.naturalistes-romands.ch



Au Bioscope

Bioscope Newsletter

Plus d'infos


vendredi 7 mars 2025

Mieux expliquer l’électricité statique en classe

 

Électricité statique : un exemple classique à l'école, dont on commence seulement à comprendre les mécanismes…

Le contexte, bref survol de ce qu'on sait déjà

En classe, on illustre souvent l'électricité statique avec un ballon frotté sur les cheveux, Cf par exemple une activité au .
Mais au delà de ces expériences assez bluffantes, les mécanismes de cette électrisation au niveau nanométrique sont mal compris.

On connaît d'étonnantes adaptations biologiques (des araignées dont le fil les maintient en l'air avec le champ électrique JTS ci ;  des bourdons munis de capteurs de champ électriques (Sutton,& al., 2016) ici. On sait que ce phénomène jour un rôle la formation des planètes (Steinpilz,& al. (2020) ici) et des nuages (Berdeklis,& al. 2001) ici.  De plus ce phénomène est au coeur de plusieurs applications industrielles (imprimantes laser et photocopieuses, prévention des décharges électrostatiques, gestion des flux de poudres et poussières dans les conduites industrielles, captation des particules fines des fumées de chauffage, etc.).

JTS présente ici une version vulgarisée : la News dans Nature (Lacks, & al., 2025) ici, et des extraits de l'article d'origine de Sobarzo et al. (2025) pour montrer que cela vaut la peine de s'y plonger pour tenter de bien comprendre… Jump-To-Science : donner envie d'accéder aux articles                plutot que vulgariser encourage le lecteur à aller vérifier dans l'article d'origine :  ici

Sobarzo et al. (2025) ici,(traduit) écrivent : "L'électrisation par contact, également appelée « tribo-chargement » ou « triboélectrification », défie notre compréhension. En principe, le phénomène semble simple : prenez deux isolants neutres, mettez-les en contact, puis séparez-les, et ils échangeront une charge électrique. Souvent associée à l'« électricité statique » et aux démonstrations classiques de ballons frottés sur les cheveux, l'électrisation par contact joue un rôle essentiel dans de nombreux phénomènes naturels, de l'électrification des nuages d'orage à l'adhésion du pollen sur les bourdons, en passant par l'accrétion de poussières dans les protoplanètes." Jump-To-Science : donner envie d'accéder aux articles                plutot que vulgariser encourage le lecteur à aller vérifier dans l'article d'origine :  ici (ils fournissent des références pour cest exemples) 

La rationale d'un article scientifique est la justification logique qui motive l'étude. En quelques mots, c'est l'explication du pourquoi l'étude est menée, en s'appuyant sur l'importance du sujet et les lacunes de la littérature existante.

La rationale = ce qu'on ne sait pas encore et que l'étude va aborder

Bien qu'on les ait empiriquement classés, on ignore pourquoi certains matériaux gagnent une charge négative et d'autres une charge positive.  Lorsqu'un élève veut comprendre en profondeur ce qui se passe précisément pour que ces électrons se déplacent, on peut avancer un début d'explications, mais on est vite emprunté et en général on néglige des aspects plus complexes, comme le rôle des nano-déformations de surface dans ces transferts de charge.D'après la news dans Nature Lacks, & al. (2025) ici

Sobarzo et al. (2025) ici, sont plus explicites "Cependant, comme le rappellent systématiquement les articles sur le sujet, les aspects les plus fondamentaux du phénomène – à savoir la nature des porteurs de charge et les causes de leur transfert – restent débattus. Parmi les observations les plus marquantes figure la tendance des matériaux à s'ordonner en séries triboélectriques, c'est-à-dire en listes transitives basées sur le signe de la charge qu'ils acquièrent. Par exemple, dans la première série de ce type, établie par J. C. Wilcke en 1757, le verre se chargeait positivement par rapport au papier, et le papier positivement par rapport au soufre ; il en résultait que le verre se chargeait positivement par rapport au soufre.

L'existence des séries triboélectriques a conduit à l'hypothèse qu'un unique paramètre sous-jacent pourrait dominer le phénomène – appelons-le φ par convention. De nombreux mécanismes ont été proposés pour expliquer φ, parmi lesquels les propriétés électroniques, l'acidité et la basicité, le potentiel zêta, l'hydrophilie et l'hydrophobie, la flexoélectricité et la mécanochimie, pour n'en citer que quelques-uns." Traduction de Sobarzo et al. (2025)  Jump-To-Science : donner envie d'accéder aux articles                plutot que vulgariser encourage le lecteur à aller vérifier dans l'article d'origine :  ici

Cette nouvelle recherche et ce qu'elle apporte

 La News (Lacks, & al., 2025) ici présente le dispositif expérimental

Dispositiif expérimental de Sobarzo et al 2025
Fig 1:  Les propriétés de transfert de charge de matériaux identiques divergent spontanément pour former une série distincte. a. Dans les expériences de Sobarzo et al., des échantillons identiques d'un matériau ont été fixés sur des tiges et pressés l'un contre l'autre, en utilisant un capteur de force pour garantir l'application d'une pression définie. L'échange de charge entre les échantillons a été mesuré à l'aide d'un dispositif capturant les particules chargées (une coupelle de Faraday) relié à un électromètre.. [figure]. Source : Sobarzo et al. (2025)

L'étude de Sobarzo et al. (2025) apporte un début d'éclairage nouveau et assez surprenant : La news (Lacks, & al., 2025) ici la résume en indiquant que des matériaux en contact « se souviennent » de leurs interactions passées. D'après Nature Lacks, & al. (2025) ici
Franchement JTS a trouvé cela étrange, fascinant, presque mystique, mais pas très éclairant. 

En lisant Sobarzo et al. (2025) ici, on trouve qu'en mesurant le  ΔQ (charge moyenne échangée sur cinq contacts, en commençant toujours avec des échantillons entièrement déchargés (voir Methods).)  alors qu'au premier frottement, ils sont à peine chargés et de polarité aléatoire (leur figure 2a), plus les échantillons ont subi de frottements, plus ils se chargent ensuite -et toujours négativement (fig 2 b) Traduction de Sobarzo et al. (2025)  Jump-To-Science : donner envie d'accéder aux articles                plutot que vulgariser encourage le lecteur à aller vérifier dans l'article d'origine :  ici

Contact drives evolution.

Fig 2:  Pour explorer les causes de l'évolution de la série, nous avons d'abord effectué des mesures de référence sur 24 paires d'échantillons vierges. Ces derniers se chargent aléatoirement autour de zéro, […]b. Motivés par l'hypothèse que l'acte de contact lui-même pourrait induire l'évolution de la série, nous avons préparé 48 nouveaux échantillons et exposé la moitié à 100 contacts préalables. En les mettant en contact avec des échantillons  n'ayant pas subi de contacts précedemment (unbiased) et en mesurant ΔQ₅, nous avons observé un effet net : les échantillons ayant subi des contacts préalables se chargent systématiquement négativement. [figure]. Source :figure 2 Sobarzo et al. (2025)

Ainsi quand la news parle de "mémoire" il s'agit d'une accumulation ΔQ  au cours des essais, JTS trouve qu'on comprend mieux en lisant l'article d'origine :-)

Un modèle : Premier paramètre proposé : l'historique des contacts (~leur intégrale)

Sobarzo et al. (2025) produisent ensuite un modèle qui reproduit leurs données expérimentales et les séries triboélectriques. Ils montrent que ce modèle explique ces  données et permet de faire des prédictions qu'on peut vérifier

Voir le texte de Sobarzo, & al. (2025) ici, et un extrait : Jump-To-Science : donner envie d'accéder aux articles                plutot que vulgariser encourage le lecteur à aller vérifier dans l'article d'origine :  ici

In this picture, the ordering of the triboelectric series at any instant should correspond to the ordering of the different potentials. However, it is clear from Fig. 2d that contact causes changes to the potentials, that is, dφi/dni = f(ni, φi,…), in which ni is the number of contacts sample i has experienced. The critical idea is now this: if contact causes the potentials to ultimately separate, then any ensemble will eventually result in a triboelectric series. Moreover, if the ordering of the final potentials,  φ i , is not the same as φ i 0 , it must be the case that, during their evolution, they 'crossed', resulting in what we (incorrectly) perceive as 'cycle

Δ Q i j φ i φ j 

We can use this hypothesis to develop a numerical model that reproduces our experimental data.

Figure 2d implies an evolution consistent with the following differential equation,

d φ i d n i = α i ( φ i φ i ) ,
in which αi are growth rates and  are the values of the potentials at infinite contacts.

Ensuite ils valident ce modèle avec des données prédites et des séries triboélectriques cf. leur figure 3. Jump-To-Science : donner envie d'accéder aux articles                plutot que vulgariser encourage le lecteur à aller vérifier dans l'article d'origine :  ici

2ème paramètre proposé ; La mécanique du contact à l'échelle nanométrique

Alors qu'on n'avait pas observé d'effet clair des frottements dans d'autres études, Sobarzo, et al. (2025) étudient en détail ces interactions et trouvent un lissage aux fréquences spatiales élevées (c.-à-d. les plus "fines" irrégularités de surface), qui parait être lié à l'électrification de ces contacts.

Il est clair que le contact modifie fondamentalement la surfaces des échantillons d'une manière qui affecte le mécanisme d'électrification par contact. Ces altérations peuvent être élémentaires (par exemple, modification de la composition atomique), moléculaires (affectant les liaisons) ou physiques (par exemple, modification de la structure/morphologie). Dans la Fig. 4,, nous présentons un ensemble de tests variant la surface afin de détecter ces changements. À l'échelle atomique, d'autres expériences sur l'électrification par contact entre différents matériaux avaient montré que le contact entraîne des modifications de la composition élémentaire. […] Cependant, le calcul de la densité spectrale de puissance (PSD) des données AFM (atomic force microscopy)  (Fig. 4h) révèle une caractéristique surprenante : les surfaces après contact sont plus lisses aux hautes fréquences spatiales. En réalisant de nombreux balayages en plusieurs endroits d'un même échantillon avant et après contact, nous constatons que ces différences sont statistiquement significatives. […] Nous montrons qu'en augmentant le nombre de contacts de 200 à plusieurs milliers, aucune modification n'apparaît dans les données LEIS, Raman et HD-SFG, mais l'adoucissement des queues de haute fréquence dans la PSD de rugosité s'accentue encore davantage. Ces observations suggèrent fortement que l'adoucissement des hautes fréquences présenté dans la Fig. 4h est bien la cause du biais de contact observé dans la Fig. 2 et, par conséquent, le moteur de l'auto-organisation spontanée dans notre système. (Traduction de Sobarzo, et al. (2025)

a, To probe atomic differences in the uppermost approximately 10 nm, we use HR-XPS and measure the Si2p, C1s and O1s peaks. Previous work44 reported a subtle (about 300 meV) shift in the O1s peak of PDMS after contact electrification with polyvinyl chloride (PVC), but averaging several measurements shows that such shifts are within noise in our experiments (that is, shaded error band in the inset). b, Focusing on elemental differences in the outermost atomic layers with LEIS again shows no measurable differences in the C, O or Si concentrations. c, To probe for molecular differences, we record Raman spectra at several locations and plot the mean (line) and standard deviation (error band). The peaks marked as +, O and * correspond to Si–C, Si–O and C–H, respectively. We observe no notable differences in any of the peaks, nor can we reproduce differences found previously30 between 1,600 and 1,950 cm−1 and attributed to COOH groups (inset). d, To probe the outermost molecular layer, we use HD-SFG to measure the symmetric/asymmetric C–H stretching modes (2,900 cm−1 and 2,960 cm−1, respectively). Within the error bands, the pristine/contacted samples are again indistinguishable. e, GIXS data for pristine and contacted samples, which probes subnanometre interatomic structure, also renders pristine/contacted samples as indistinguishable. f, Using SEM to image each surface, we find no visible changes in the surface integrity; regions with (rare) specks are shown intentionally to aid visualization. Scale bars, 20 μm. g, With AFM to characterize surface roughness, we do not find any visible differences. Scale bars, 2 μm. h, However, we do detect differences in the PSD of the roughness, for which contacted samples are smoother at higher spatial frequencies than uncontacted ones. The error bands represent scatter from about ten measurements on different regions for the same sample in the pristine/contacted states, indicating that this result is statistically significant. a.u., arbitrary units.

Fig 4: Ce qui change lors du contact 4h : Différences dans la Densité Spectrale de Puissance (PSD) de la rugosité, les échantillons ayant été en contact étant plus lisses aux hautes fréquences spatiales . Les bandes d'erreur représentent la dispersion d'environ dix mesures effectuées sur différentes régions d'un même échantillon dans ses états initial (pristine) et après contact, indiquant que ce résultat est statistiquement significatif. Légende et figre 4 complète voir ici   [img]. Source :Sobarzo et al. (2025)

Une conclusion prudente
Sobarzo, & al. (2025) concluent qu'aborder le problème en termes de séries triboélectriques ne mène pas très loin, mais que l'étiudier en termes d'historique des contacts, et de mécanique du contact à l'échelle nanométrique serait une piste de recherche féconde.

Nous concluons que l'imprévisibilité de l'électrisation par contact n'est peut-être pas si insurmontable. En prêtant une attention rigoureuse à l'historique des contacts, nous pouvons non seulement expliquer cette imprévisibilité, mais aussi la maîtriser. En tenant compte de l'effet de l'historique des contacts, la notion de série triboélectrique peut être un outil heuristique utile, mais guère plus. Si cet effet est généralisé, chercher un ordre immuable reviendrait à poursuivre un mirage.

Enfin, en nous concentrant sur l'électrisation par contact entre matériaux identiques et sur des sources spécifiques d'imprévisibilité, nous isolons les éléments minimaux pertinents pour ses mécanismes. Face à un phénomène (1) aussi imprévisible et (2) étudié par des disciplines scientifiques distinctes, avec des langages et des cadres conceptuels différents, une telle clarification est précieuse. Dans notre système, elle nous permet de conclure que la cause du transfert de charge est intimement liée à la mécanique du contact à l'échelle nanométrique.Traduction de Sobarzo et al. (2025)  Jump-To-Science : donner envie d'accéder aux articles                plutot que vulgariser encourage le lecteur à aller vérifier dans l'article d'origine :  ici

Les limites  et les nouvelles questions qu'elle pose
Cette "mémoire" est évidemment assez troublante, et ne résout pas tout,  mais stimule la curiosité des chercheurs, permet de nouvelles hypothèse et relance une question qui n'avançait guère. 
Souvent, la science avance par petites touches dont on ne voit pas tout de suite  en quoi elles seront importantes et mèneront à  des applications (cf p. ex. le yaourt et la révolution CRISPR/Cas9 -
JTS-ici).
En lisant Sobarzo et al. (2025) ici, on trouve
"À la lumière de ces résultats, deux des mécanismes présentés dans l'introduction méritent une attention particulière : la mécanochimie et la flexoélectricité. Le premier suggère que la contrainte mécanique — qui devient extrêmement élevée lors de la déformation des aspérités à l'échelle nanométrique — peut suffire à provoquer une rupture hétérolytique des liaisons, entraînant ainsi la libération d'espèces chargées pour le transfert. Le second établit un lien entre la polarisation électrique et les gradients de contrainte mécanique — qui deviennent également importants lors de la déformation à l'échelle nanométrique — et peut donc être attendu pour produire d'importants champs électriques lors du contact.
Nos données ne suffisent pas à valider ou invalider directement l'une ou l'autre de ces hypothèses, mais elles nous incitent à une hypothèse intrigante : les deux pourraient être impliquées simultanément. Notre travail appelle ainsi à un examen plus approfondi de ces mécanismes, potentiellement en interaction, en mettant l'accent sur la nature fondamentalement tribologique de l'électrification par contact."  Traduction de Sobarzo et al. (2025)  Jump-To-Science : donner envie d'accéder aux articles                plutot que vulgariser encourage le lecteur à aller vérifier dans l'article d'origine :  ici
Cette recherche pourrait avoir des applications industrielles et même le problème des poussières sur la lune (Witze, et al. 2025) ici, et sa toxicité (Pohlen et al., 2022)  ici .

Des perspectives pour l'enseignement
Ces résultats permettent d'aborder avec un angle nouveau des questions fondamentales en physique : D'après la news dans Nature Lacks, & al. (2025) ici
    Quelles particules (électrons, ions, fragments de matière) sont impliquées dans l'électrisation ?
    Pourquoi l'ordre de charge des matériaux (série triboélectrique) reste-t-il empirique et non prédictif ? Sobarzo et al. (2025)   apportent des réponses
    Comment des phénomènes à l'échelle nanométrique influencent-ils des effets macroscopiques observables en classe ? Sobarzo et al. (2025)  apportent des indices pour savoir où chercher

Elle ouvre la voie à une meilleure compréhension des phénomènes électrostatiques - et ainsi d'ouvrir une de ces boites noires qu'on utilise souvent pour pudiquement cacher des explications complexes (Haskel-Ittah, 2023), Orange & Orange Ravachol,  2024)

"quelle boite noire  peut-on / doit-on ouvrir ? Lesquelles doit-on laisser fermées, mais en évitant d'apparentes incohérences entre les faits retenus. S'il est impossible d'ouvrir, dans une étude donnée, toutes ces boites (dans le travail scientifique comme à l'école), les laisser toutes fermées pour éviter les problèmes et aller au plus vite à la « bonne solution » empêche toute problématisation approfondie. (Orange & Orange Ravachol,  2024 p. 101)


Peut-être saura-t-on bientôt ouvrir une boite noire de plus et expliquer ce qui se passe lorsqu'on retire un pull synthétique et qu'il attire les cheveux ?.

Remerciements

Remerciements à Laura Weiss pour une relecture détaillée et plusieurs commentaires constructifs qui ont amélioré cette publication.

Références (Les membres Jump-To-Science peuvent obtenir ces articles).

  • Berdeklis, P., & List, R. (2001). The Ice Crystal–Graupel Collision Charging Mechanism of Thunderstorm Electrification. Journal of the Atmospheric Sciences, 58(18), 2751‑2770. https://doi.org/10.1175/1520-0469(2001)058<2751:TICGCC>2.0.CO;2
  • Haskel-Ittah, M. (2023). Explanatory black boxes and mechanistic reasoning. Journal of Research in Science Teaching, 60(4), 915‑933. https://doi.org/10.1002/tea.21817
  • Lacks, D. J. (2012). The Unpredictability of Electrostatic Charging. Angewandte Chemie International Edition, 51(28), 6822‑6823. https://doi.org/10.1002/anie.201202896
  • Lacks, D. J., & Sow, M. (2025). The secrets of static electricity are finally being revealed. Nature, 638(8051), 616‑618. https://doi.org/10.1038/d41586-025-00298-7
  • Orange, C., & Orange Ravachol, D. (2024). Les « éducations à » sont-elles compatibles avec le développement d'une pensée critique en SVT ? Les didactiques face à l'évolution des curriculums. Savoir(s) et pratiques pour entrer dans la complexité du monde. Actes du 6ème colloque international de l'ARCD, 97‑109. https://archive-ouverte.unige.ch/unige:174755
  • Pohlen, M., Carroll, D., Prisk, G. K., & Sawyer, A. J. (2022). Overview of lunar dust toxicity risk. Npj Microgravity, 8(1), 1‑9. https://doi.org/10.1038/s41526-022-00244-1
  • Sobarzo, J. C., Pertl, F., Balazs, D. M., Costanzo, T., Sauer, M., Foelske, A., Ostermann, M., Pichler, C. M., Wang, Y., Nagata, Y., Bonn, M., & Waitukaitis, S. (2025). Spontaneous ordering of identical materials into a triboelectric series. Nature, 638(8051), 664‑669. https://doi.org/10.1038/s41586-024-08530-6
  • Sutton, G. P., Clarke, D., Morley, E. L., & Robert, D. (2016). Mechanosensory hairs in bumblebees (Bombus terrestris) detect weak electric fields. Proceedings of the National Academy of Sciences, 113(26), 7261‑7265. https://doi.org/10.1073/pnas.1601624113
  • Witze, A. (2025). Private spacecraft nails Moon landing : First images of Blue Ghost on the lunar surface. Nature. https://doi.org/10.1038/d41586-025-00670-7Steinpilz, T., Joeris, K., Jungmann, F., Wolf, D., Brendel, L., Teiser, J., Shinbrot, T., & Wurm, G. (2020). Electrical charging overcomes the bouncing barrier in planet formation. Nature Physics, 16(2), 225‑229. https://doi.org/10.1038/s41567-019-0728-9